SEANCE 5

Nouvelles de Pétersbourg

Nicolas Gogol

Objectifs :

Construire une biographie de l'auteur afin de confirmer la lecture de la fragmentation dans Les Nouvelles de Pétersbourg

Interroger l'inscription de la société russe dans les récits et reconnaître dans les formes de discontinuité relevées (comiques, fantastiques) une esquive ironique de l'auteur


I./ Biographie de Gogol : expériences et ruptures

II./ La Russie au 19ème siècle et son inscription dans l'oeuvre
          Les formes du pouvoir et leur représentation
          La fragmentation : esquive ironique de la censure et pratique heuristique
          Les variantes

     


I./ Biographie de Gogol

A partir des informations trouvées, on peut demander un tri pertinent : Que choisir ? Que retenir ? La lecture documentaire des dossiers accompagnant les livres, des synthèses proposées dans les collections parascolaires, doit permettre à la lumière de l'étude menée jusqu'ici de savoir élaguer afin que l'information réponde au problème posé car il s'agit moins de cumuler de l'information que de répondre à un problème de lecture. On ne retiendra donc que l'essentiel :

Quelles traces de discontinuïté dans la vie de Gogol ?

GOGOL
(1809-1852)

Expériences et ruptures dans l'existence de l'auteur

Perte du père (1825), gentilhomme qui possédait une

une propriété de 200 âmes. Après son décès, Gogol part à Pétersbourg avec de grandes ambitions.

Problèmes de santé : hypocondrie, mélancolie, et à la suite de crises mystiques, d'exaltation religieuse, jeûne puis mort en 1852...

Difficultés financières (années 1830)...

Expériences de la désillusion : A la mort de son père, il quitte la propriété natale pour gagner Pétersbourg, la capitale, où il croit pouvoir réaliser ses rêves. Elle le déçoit profondemment (il désirait devenir haut fonctionaire) : son ascension ne se produit pas aussi vite qu'il l'imaginait. Pourtant, il est fils de propriétaire foncier... ses illusions se brisent au contact d'une réalité décevante. Presque immédiatement, il trouve prétexte pour voyager : Rome, Paris...et surtout il fera un pélerinage en terres saintes.

Des échecs littéraires, notamment ses premières oeuvres, ou mauvaise réception de ses textes, notamment à l'occasion du Révizor (1836) qui est autant salué par la critique que critiqué comme une pièce subversive. Gogol, partagé, oeuvrera pour la gloire du pays, rompant de plus en plus avec sa veine satirique pour produire (par exempls : Extraits de ma correspondance) une oeuvre piétiste de rachat du mal qu'il a causé. Mais alors, ses nouvelles pratiques sont décriées par ses amis qui ne le reconnaissent pas et y voit en définitive l'oeuvre d'un esprit malin ou malade...

C'est donc la désillusion et l'incertitude qui caractérisent Gogol : ambitions déçues, vocation littéraire très forte mais aussi très attachée et très sensible à la réception de l'oeuvre. L'exaltation religieuse constitue une issue possible et un refuge pour l'écrivain. Du moins on peut comprendre que nos textes ne sont en réalité que des oeuvres sans cesse recommencées, rectifiées, leur fragmentation est constitutive de l'incertitude ou plus exectement d'une recherche spirituelle autant que sociale de l'auteur : la deuxième partie du Portrait notamment est rajoutée 7 ans après la première publication (1835-1842) afin d'y proposer une conception apologétique de l'art.


La Russie au 19ème siècle et son inscription dans le texte

Le régime politique

Le régime tsariste de Nicolas 1er est autocratique. Après tentative d'insurrection en 1825, le régime se durcit. L'empire radicalise notamment ses structures administratives : les textes au programme illustrent le pouvoir de cette bureaucratie à la fois aliénante et triomphante car l'économie et l'argent y ont une grande place (qu'illustre la fascination inquiète des petites gens pour l'usurier). La table des rangs, bien que non instituée par le régime, est la parfaite illustration des ambitions souvent mesquines des fonctionnaires russes qui aspirent à monter en grade...

L'argent, le mariage permettent de réaliser ces ambitions. Le texte en dénonce la mesquinerie et la force aliénante. Deux types de personnages illustrent les clivages de cette société : les petites gens souvent décrits ( artisan, prostituées, barbier, tailleur, petits fonctionnaires) et les riches qui détiennent le pouvoir (hauts fonctionnaires notamment dans les textes).

Les pratiques sociales

Le régime est caractérisé par le contrôle des idées et des représentations artistiques du pouvoir : Une forte censure pèse alors sur les artistes. Il n'empêche que l'activité culturelle et artistique à l'époque est très riche en pratiques nouvelles et innovantes. La Russie en ce domaine était très en retard sur le reste de l'Europe et notamment la france qui constitue un modèle. La société est archaïque, ses structures économiques sont féodales (existence encore des serfs).
La littérature russe nait véritablement à cette époque qui ne faisait que reproduire les oeuvres de la littérature française.
La ville par conséquent, concentre les aspirations sociales des russes, et toutes les représentations de l'espace dans les textes manifestent à la fois cette fascination et cette étrangeté que concentre la Perspective et ses rues adjacentes. Le quartier de Kolomna, décrit comme un espace marginal où "l'avenir (ne) pénètre pas", où les hommes sont "cendreux" illustre dans le portrait  cette représentation de l'espace urbain qui coexiste avec les quartiers les plus riches : c'est la naissance de la ville moderne qui relègue les infortunés et les ghettoïse.

La fragmentation : esquive ironique de la censure et pratique heuristique

S'il y a bien une vision réaliste de la société russe dans les textes, elle n'est donc pas explicitement avouée. Au contraire, la discontinuité relevée est une nécessité pour Gogol. il s'agit de contourner la censure et, sous couvert du comique, d'une indécision affichée qui fonde le genre fantastique, de détourner la représentation réaliste pour en conserver l'intention critique.

Le fantastique constitue donc une catégorie de l'ironie : forme d'esquive qui crée connivence avec le lecteur, afin de produire une satire implicite d'une société trop autoritaire pour permettre la critique directe. De même, le récit souvent décousu ou du moins qui met en branle les codes de la représentation mimésique du réel est l'expression littéraire de l'argument de l'auteur : cacher pour mieux montrer, rompre avec l'habitude du lecteur pour mieux le convaincre.

Relevé et analyse de variantes

Dans La Perspective

La correction reçue par pirogov dut être remaniée en 1833 par Gogol. Au lieu de la décrire, l'auteur suggéra encore une fois une incompétence : " ils le traitèrent si grossièrement et impolimment que j'avoue ne pas trouver de mots pour décrire ce douloureux événement".

Dans Le Nez

La découverte du nez par le barbier se produit le selon les versions le 25 avril, le 25 mars, le 7 avril, ou encore le 23 février. La version retenue par nos éditions est le 25 mars. c'est un jour de fête, jour de l'Annonciation qui est une fête religieuse importante. Les variantes peuvent permettre de voir dans ce choix une intention satirique et blasphématoire.

Autre variante : le nez est découvert par Kovalev dans la cathédrale Notre-Dame-de-Kazan : prévoyant la censure Gogol choisit plutôt un lieu anaodin, un magazin. Cette variante est adoptée dans la collection GF du texte au programme. Pas dans les éditions de Poche et Folio !

Dans le Journal d'un fou

Le passage par exemple citant la lettre du chien, page 269 de l'édition de Poche, consacré aux décorations fut supprimé par la censure...

                              Dans le Portrait
                                 et BILAN

La réécriture du Portrait,
notamment la deuxième
partie est une réponse à
l'insatisfaction de l'artiste
dont la vision du monde ne
résout pas les contradictions
de l'homme.

GOGOL

Obsédés par les femmes, l'argent, leur nez ou leur manteau, en quête d'une réhabilitation ou d'autorité ou plus simplement de tranquillité ou d'amour, les personnages des récits trouvent ici réponse à leur impossible maîtrise d'un monde disloqué ou qui les disloque. Gogol, anticipant souvent la censure, propose dans ce récit une vision plus apaisée de l'artiste, et, au delà, de l'homme. Seule la foi et le repentir dans l'abnégation permettent selon ce texte d'accéder à une harmonie perdue ou disloquée par les forces démoniaques de la réalité russe.


Préparation de la séance 6 :

Relire les cours. Reparcourir les textes : évaluation
+ liste de questions de synthèse possibles pour l'examen final...

Vers la séance 6-7  


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